Comment définir l’alimentation saine en milieu institutionnel?
Une alimentation saine est constituée d’une diversité d’aliments qui sont en priorité (c’est-à-dire le plus fréquemment et en plus grand nombre) de valeur nutritive élevée, telle que décrite par la Vision de la saine alimentation du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.
Source : Vision de la saine alimentation du ministère de la Santé et des Services sociaux (2010).
De par l’exemplarité qui les caractérise, les établissements dont la mission est l’éducation ou la santé se doivent de mettre l’accent sur les aliments de valeur nutritive élevée de façon quotidienne, tout en limitant la présence d’aliments de valeur nutritive faible. Ces derniers sont des aliments d’occasion, qui ne devraient être offerts que de temps à autre, lors de fêtes par exemple.
Source : Vision de la saine alimentation du ministère de la Santé et des Services sociaux (2010).
Selon le Guide alimentaire canadien (GAC) et l’application des lignes directrices canadiennes en matière d’alimentation du GAC, une alimentation saine est composée d’une variété d’aliments de valeur nutritive élevée et peu transformés, servis plusieurs fois par jour :
- des fruits et des légumes en abondance : parmi les légumes, inclure des légumes vert foncé tous les jours et orange quelques fois par semaine;
- des grains entiers, des aliments à grains entiers et de blé entier variés, tels que les pains et pâtes de grains entiers, sarrasin, quinoa, avoine, orge mondé, et riz brun;
- des aliments protéinés, principalement d’origine végétale (par exemple : légumineuses telles que les haricots pinto et les lentilles béluga, noix, graines, tofu, tempeh);
- des aliments riches en calcium;
- et l’eau, la principale boisson de choix.
De plus, le GAC précise l’importance de :
- réduire les aliments de faible valeur nutritive (tels que les aliments ultra-transformés);
- privilégier des aliments ou des ingrédients qui contiennent peu de sodium, de sucre et de gras saturés.
Pour savoir si un aliment contient des nutriments à favoriser ou à limiter, référez-vous au pourcentage de la valeur quotidienne (VQ) se situant dans le tableau de la valeur nutritive : 5 % VQ ou moins est peu; 15 % VQ ou plus est beaucoup.
L’alimentation saine vise à être compatible avec l’alimentation durable, et la création de menus offrant des aliments de qualité en milieu institutionnel devrait se faire en tenant compte des principes du développement durable, c’est-à-dire, entre autres, des dimensions :
- socioculturelles (ex.: acceptabilité des aliments selon la culture, la religion et l’identité, environnement associé aux repas, tels que le plaisir, les lieux, l’atmosphère et temps accordé);
- nutritives (ex.: réponse aux besoins nutritionnels en quantité appropriée, sécurité alimentaire, salubrité et innocuité des aliments);
- économiques (ex.: aliments locaux, aliments équitables ou socio-responsables assurant une rémunération adéquate des acteurs bioalimentaires, disponibilité et accès à une alimentation abordable de qualité);
- environnementales (ex.: aliments produits selon des pratiques respectueuses de l’environnement, en privilégiant les circuits de proximité et les produits de saison et un usage raisonné des emballages, et des pratiques d’approvisionnement, de production et de distribution visant à limiter le gaspillage alimentaire et nutritionnel);
- gouvernance (ex.: compréhension du système alimentaire, de l’origine des produits et des modes de production et de transformation, information aux consommateurs et transparence des pratiques).

Saviez-vous que?
En 2023, la Direction régionale de santé publique (DRSP) de Montréal a entrepris un immense travail de rédiger un texte sur leur vision de l’alimentation durable. Cliquez ici pour le consulter!
Comment privilégier les aliments sains et locaux dans les institutions?
Un aliment dit local peut être défini de manière différente selon divers acteurs. Le qualificatif local peut référer à un aliment cultivé et/ou préparé et/ou transformé à proximité de son lieu de consommation, selon une distance définie qui peut être à l’échelle d’une province, d’une région, d’une commune ou même d’un foyer.

Les aliments locaux sont souvent perçus comme étant plus nutritifs, et ce, pour plusieurs raisons, telles qu’une meilleure traçabilité et la perception de l’absence d’antibiotiques, d’hormones de croissances, d’organismes génétiquement modifiés, de pesticides et d’engrais de synthèse (1-7). D’ailleurs, plusieurs études à travers le monde montrent que les consommateurs perçoivent les aliments locaux comme étant de meilleure qualité, plus naturels et de meilleure valeur nutritive (2, 7-9).
Ainsi, il existe chez certains consommateurs une perception d’une meilleure qualité globale des aliments locaux (9). Alors que les motivations des consommateurs à acheter des aliments locaux frais semblent être orientées vers la santé humaine, il a été démontré que les motivations des producteurs à vendre localement seraient également basées sur une vision plus globale de la santé, c’est-à-dire qu’ils incluent également une dimension de santé écologique (1).
Malgré ces perceptions, très peu de liens ont été établis entre les aspects nutritifs et locaux des aliments. Par contre, des liens indirects peuvent être faits entre les pratiques d’achats d’aliments locaux et des données de santé. Par exemple, une étude a montré une association entre une adhésion plus élevée à une alimentation saine de type méditeranéenne et une plus grande probabilité d’acheter des aliments locaux (10). D’autres études ont montré des associations entre l’accès à des marchés fermiers ou à l’agriculture soutenue par la communauté et l’indice de masse corporelle (IMC) de la population (11-12). Un meilleur accès à ces moyens d’approvisionnement était ainsi associé à un IMC plus faible des consommateurs. Par ailleurs, selon une étude américaine, 50 % des consommateurs interrogés ont déclaré avoir augmenté leur consommation de fruits et légumes depuis qu’ils fréquentent un marché fermier (13).
Il manque ainsi des preuves de liens directs entre la consommation d’aliments locaux et l’alimentation saine (14-15). Cela peut s’expliquer en partie par l’utilisation variable du concept d’alimentation locale; certains se fiant sur la distance géographique entre le lieu de production et/ou de transformation et le lieu de consommation (qui elle-même peut varier), sur les limites administratives ou géopolitiques (village, ville, région, province, état, pays), ou encore sur le lien avec des méthodes d’approvisionnement et de distribution (telles que l’agriculture soutenue par la communauté, les marchés fermiers, la vente directe du fermier, etc.), ainsi que la transformation (8, 14, 16-18).
Par conséquent, les aliments locaux ne sont pas nécessairement plus nutritifs. La valeur nutritive des aliments est grandement influencée par plusieurs facteurs, dont la nature du produit, la durée d’entreposage et le temps de transport (14). La courte distance entre le lieu de production et/ou de transformation et le lieu de consommation ne garantit pas que les aliments arrivent plus vite dans l’assiette du consommateur. La saisonnalité peut également entraîner une longue période d’entreposage durant l’hiver, ce qui peut réduire le contenu en nutriments.
D’autre part, la valeur nutritive des produits d’origine végétale et animale varie selon l’environnement physique dans lequel ils grandissent (14). Il est donc peu probable qu’on retrouve des conditions physiques idéales partout dans le monde. Par exemple, certaines régions du monde sont connues pour la présence de contaminants dans les légumes, la viande et les poissons locaux. L’effet sur la santé humaine reste à étudier, mais dans certaines régions les niveaux d’exposition dépassent les seuils recommandés afin de prévenir les risques pour la santé (19-25). Les aliments locaux ayant grandi dans ces régions ne seraient donc pas favorables à la santé humaine pour les populations qui habitent ces régions.

Ainsi, pour privilégier des aliments nutritifs et locaux, il importe de se référer à la nature de l’aliment. Une alimentation qui est à la fois saine et locale respecte les principes du GAC, tout en contribuant au développement d’une agriculture québécoise durable, qui est résiliente aux changements climatiques, en favorisant la production locale de cultures émergentes diversifiées à faible impact environnemental et à valeur nutritive élevée, ayant reçu une transformation minime.
Comprenant ces notions, il faut d’abord se référer à la nature de l’aliment pour faire le choix d’aliments nutritifs et locaux. Quel est l’aliment? Quelle est sa valeur nutritive? Quel est son niveau de transformation? Ces questions pourront orienter nos choix vers des aliments qui sont avant tout nutritifs, pour ensuite y inclure des notions locales : des aliments qui poussent et sont transformés (le moins possible) le plus près de chez nous, avec le moins d’intermédiaires possibles.
Le projet Alimentation saine au coeur de Commun’assiette
Afin de promouvoir et faciliter un approvisionnement alimentaire nutritif en milieu institutionnel, Équiterre et l‘Observatoire de la qualité de l’offre alimentaire de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF) de l’Université Laval, en collaboration avec le Groupe de travail sur l’accès à une offre alimentaire de qualité (GTOA) de la Table québécoise sur la saine alimentation (TQSA) ont souhaité réaliser une section alimentation saine sur le portail web Commun’assiette. C’est ainsi que le projet Alimentation saine au cœur de Commun’assiette a vu le jour en 2023. Merci à tous les partenaires!

