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[Portrait] Josée Lavoie : la créativité au service de l’alimentation durable

À l’instar de ses collègues du projet Commun’assiette, Josée Lavoie a multiplié les actions pour offrir à sa clientèle du CHU Sainte-Justine une alimentation compatible avec la philosophie du développement durable. Livre de recettes, service aux chambres, analyse de l’empreinte carbone, micromarché, menu de saison, réduction des pertes et du gaspillage alimentaire… si l’amélioration passe par l’innovation et la motivation, elle en est l’exemple parfait.

Josée Lavoie est entrée en poste comme cheffe de service en 2009. Titulaire d’une maîtrise en science des organisations, un programme orienté sur les processus décisionnels dans les institutions publiques ou privées, elle s’est rapidement donné comme mission de faire évoluer le service alimentaire du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine.

Au fil de notre entretien, elle multiplie les analogies, appuie ses propos en donnant des exemples clairs et découpe ses idées avec des éclats de rire. Son énergie est contagieuse, et elle s’exprime avec passion sur les projets de son équipe ainsi que sur les défis et les solutions qu’elle entrevoit dans l’avenir.

Comme à l’hôtel, ou presque

Aujourd’hui coordonnatrice des activités d’alimentation au CHU Sainte-Justine, elle reconnaît que le taux de satisfaction des patients concernant l’offre alimentaire n’était pas très élevé il y a quelques années. « On a identifié ce qui pouvait être fait pour améliorer notre offre. Ça nous a amenés à changer complètement notre mode de distribution et à procéder à des rénovations majeures pour passer à ce qu’on appelle un service d’hôtellerie. Dans sa chambre, le patient a un menu. Quand il a faim, il appelle, et on lui livre ce qu’il veut, à l’heure qu’il veut. »

Le service d’hôtellerie permet de redonner un certain contrôle aux petits patients de l’hôpital pédiatrique et à leurs parents, mais contribue également à réduire les pertes. « Dans les hôpitaux du Québec, les repas sont livrés de manière automatique. Alors, si un patient doit être à jeun pour passer un scan, il reçoit son déjeuner quand même. Ici, 25 % de nos plateaux étaient jetés sans même avoir été touchés, sans compter les plateaux qui revenaient à moitié pleins. » Les pertes, avant le service d’hôtellerie, étaient estimées à près de 50 %. Aujourd’hui, Josée Lavoie les évalue à entre 5 % et 10 % selon les années.

Un monde de possibilités

Au CHU Sainte-Justine, Josée Lavoie et son équipe ont travaillé sur la distribution, mais dans un souci de développement durable, ils ont aussi complètement revu les menus à la chambre et à la cafétéria. Quand la gestionnaire parle du restaurant et décrit les bars à pâtes, à sandwichs, à pizzas et à salades, on a presque l’impression d’y goûter! Visiblement à l’aise dans la mise en place de projets innovants, elle a aussi tenu compte de la saisonnalité des produits dans l’élaboration des repas. Pour faciliter l’intégration de produits locaux, son équipe et elle ont opté pour un menu estival comportant des laitues et des légumes frais, par exemple, et un menu hivernal où on trouve des produits comme la courge et la patate douce.

Ça s’est fait graduellement, mais aujourd’hui, 50 % de l’offre alimentaire du CHU Sainte-Justine est végétarienne ou végane, et 66 % des produits proposés sont achetés localement. Un travail de communication a aussi été effectué pour permettre d’identifier facilement les produits locaux, sans hormones, sans antibiotiques, végétariens ou véganes, dans un souci de promouvoir le développement durable en lien avec l’alimentation. « Si vous regardez mon menu, vous allez voir des logos partout! Pour continuer dans cette voie-là, il faut aussi être capable d’amener les gens à faire de bons choix. »

Si on en croit la gestionnaire, avec de la volonté et de la créativité, il n’y a pas de limite à ce qu’une organisation peut faire pour amorcer ou poursuivre son virage vers une alimentation durable. Véritable précurseur en alimentation dans le domaine hospitalier, Josée Lavoie aborde maintenant les questions complexes de la réduction des gaz à effet de serre et du gaspillage alimentaire. « Récemment, on a fait une fixation sur le pain, un produit qu’on consomme énormément ici en sandwich, au déjeuner, etc. On gaspillait des quantités incroyables de croûtes, jusqu’à deux tonnes par année. Alors, on a mis au point des recettes qui nous évitent de jeter les deux tranches du bout de la miche en les utilisant dans différentes recettes : des puddings au pain, des brownies, etc. »

Travailler ensemble pour un avenir durable

Le projet Commun’assiette offre des possibilités uniques de partage de connaissances et de réflexions concrètes auxquelles la gestionnaire s’assure de contribuer. « On travaille avec Équiterre depuis 2017. Alors, quand Commun’assiette est arrivé, on a embarqué tout de suite. »  

Elle voit d’ailleurs un grand potentiel de développement et de rayonnement pour ce projet fédérateur de communauté de pratique et souhaite que la famille s’agrandisse, que chaque région puisse y mettre sa couleur, partager ses succès et apprendre des autres. « Commun’assiette permet aux gens de communiquer, mais aussi de faire changer des choses. Il ne faut pas que ça s’arrête. »

La force du groupe donne la possibilité, dit-elle, « de brasser le cocotier ». Et même si les gens rassemblés par Équiterre doivent relever des défis très différents, « on a le même discours, on a tous à cœur le développement durable, c’est notre leitmotiv. »

En reconnaissance de son dynamisme et du leadership dont elle a fait preuve dans les nombreux projets qu’elle a menés, toujours dans le but d’améliorer le service à la clientèle et d’offrir une alimentation plus saine, Équiterre l’a nommée membre honoraire en 2024. La pionnière, une véritable locomotive en alimentation durable institutionnelle, espère que d’autres organisations suivront l’exemple de Sainte-Justine : « Mon objectif, c’est d’aider et de motiver les autres… »

« Commun’assiette permet aux gens de communiquer, mais aussi de faire changer des choses. Il ne faut pas que ça s’arrête. »

Josée Lavoie

Coordinatrice des activités d’alimentation, CHU Sainte-Justine