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[Portrait] Philippe Grand : manger des aliments locaux dès la petite enfance

Manger sainement s’apprend tôt. En agissant auprès des tout-petits, l’Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE), qui représente 80 % des centres de la petite enfance (CPE) et des milieux de garde de la province, espère contribuer à long terme à la promotion d’une alimentation saine, locale et durable. 

Deux cent mille : c’est le nombre approximatif d’enfants que l’AQCPE rejoint et représente par le biais de tous ses membres. « Ça fait beaucoup de petites bouches à nourrir tous les jours de la semaine ! », s’exclame Philippe Grand, directeur du service Saine alimentation de l’association. 

En effet, en plus de son rôle de représentation politique, l’association offre des services de soutien et d’accompagnement aux CPE, autant en matière de finances et de pédagogie que d’alimentation. 

« Notre équipe est composée notamment de nutritionnistes spécialisés en alimentation pour la petite enfance », précise Philippe Grand, lui-même nutritionniste de formation, qui travaille depuis plusieurs années pour cette jeune clientèle. 

Ce dernier sait à quel point donner accès à des aliments nutritifs aux tout-petits est prioritaire. « On a commencé autour de 2018 à parler davantage de l’importance d’intégrer des aliments plus responsables, locaux et durables dans les menus des CPE, et ça a augmenté d’année en année depuis. »

« Pour nous, c’était super cohérent d’être présents [au sein de] Commun’assiette depuis les tout débuts. On est une des seules associations qui représente la petite enfance, soit les enfants de 0 à 5 ans. On dit souvent que c’est à l’école que l’alimentation est importante. Nous, on est là pour faire comprendre que c’est important bien avant l’âge scolaire. On le voit dans plusieurs études. D’ailleurs, Équiterre fait des projets de sensibilisation dans des CPE depuis plusieurs années déjà. »

Un poste, plusieurs chapeaux

Gérer un service alimentaire dans un centre de la petite enfance n’est pas une mince affaire. « Les responsables de l’alimentation sont souvent appelés cuisiniers ou cuisinières, mais ils ont beaucoup d’autres tâches à effectuer en plus de préparer les repas et les collations, souligne d’emblée Philippe Grand. À l’AQCPE, on leur offre des formations et des conseils pour les aider à construire leur menu, mais aussi pour qu’ils puissent faire des choix alimentaires sains, locaux et le plus écoresponsables possible quand vient le temps d’acheter leurs ingrédients. » 

Penser un menu pour les jeunes enfants a aussi des particularités.

« Les menus dans les CPE sont réfléchis par rapport aux quantités à préparer selon le nombre d’enfants à nourrir, mais il faut aussi qu’ils favorisent le développement du goût, sans toutefois proposer trop de variété, pour éviter que l’enfant soit déstabilisé, explique le nutritionniste. Et on ne parle même pas des différents accommodements auxquels on doit penser, notamment en ce qui a trait aux allergies alimentaires ! C’est super complexe. » 

Cherchant à faire rayonner le travail colossal des responsables de l’alimentation des CPE tout en leur offrant des outils concrets, l’association a créé le balado Le petit PopoteCast, qu’on peut écouter sur BaladoQuébec ou Spotify. À travers chacun des courts épisodes, conçus pour être écoutés par les membres alors qu’ils sont affairés en cuisine, ce balado donne des informations pratiques sur plusieurs sujets liés directement à leur réalité en CPE, dont les façons de faire des choix alimentaires sains et locaux.

Vers le changement, un petit pas à la fois

Il y a deux ou trois ans, l’association a aussi pu accompagner une vingtaine de CPE durant un an pour passer en revue leurs achats, grâce à un projet financé par la Stratégie nationale d’achat d’aliments québécois (SNAAQ).

« On voulait essayer de voir comment changer certains achats », explique Philippe Grand, à qui rien ne fait plus plaisir que de voir ses conseils porter fruit.

Ce passionné souligne l’apport de Commun’assiette durant ce projet.

« Entendre ce que faisaient d’autres institutions membres de Commun’assiette, ça nous a inspiré certains changements et ça nous a amenés à revoir notre façon de collecter nos données. Et puis, c’était très motivant de savoir qu’on n’était pas les seuls à faire ce genre d’exercice. »

Ce qu’il a constaté avec le temps, c’est qu’il vaut mieux aborder le changement une petite bouchée à la fois. « On suggère souvent à nos membres d’identifier ce qui est le plus facile à changer pour eux. Est-ce que c’est de privilégier d’autres types de grains, de diminuer la viande ou d’incorporer des protéines végétales ? Quels aliments sont les plus faciles à acheter localement, pour eux ? On l’a vu avec Commun’assiette : mieux vaut y aller étape par étape que d’essayer de tout modifier d’un coup. »

Un des grands défis, en CPE, est par ailleurs de pérenniser les bonnes pratiques, ajoute Philippe Grand : « Quand un responsable de cuisine est hyper motivé par l’achat québécois et écoresponsable, c’est super. Mais si cette personne part et qu’elle est remplacée par quelqu’un qui n’a pas ces connaissances-là, on doit tout reprendre à zéro. Il faut que les nouvelles pratiques mises en place soient intégrées aux politiques alimentaires des CPE pour s’assurer de leur pérennité. »

Tu fais un peu de tout quand tu travailles en cuisine en CPE, tu butines, donc de savoir ce que d’autres font chez eux grâce au réseautage que permet Commun’assiette, c’est un méga avantage.

Philippe Grand

Directeur du service Saine alimentation, Association québécoise des centres de la petite enfance (AQCPE)